Les métavers ont annoncé l’arrivée d’un monde unique, universel, connecté, en ligne et virtuel. Pour favoriser la résilience émotionnelle dans ce monde en ligne, nous devons créer des espaces sociaux et émotionnels. Pour que les êtres humains puissent apprendre, s’adapter et s’épanouir efficacement, ils doivent se sentir socialement connectés et émotionnellement en sécurité.
Comment y parvenir dans les métavers ?
Améliorer la durée d’attention – La vie dans le métavers s’accompagnera d’une surcharge d’informations, avec son lot de distractions et de confusion. Contrairement au passé, où les étudiants recevaient la plupart des informations des manuels scolaires, qui pouvaient devenir très vite obsolètes, les informations d’aujourd’hui sont continuellement mises à jour et disponibles en un clic de souris. La connaissance ne fera que continuer à voyager plus rapidement au fur et à mesure des progrès technologiques. Cependant, l’utilisation de multiples modes d’apprentissage, notamment les sons, les mouvements, les scintillements et les couleurs, peut servir de distraction. Ce phénomène a été mis en évidence dans une étude récente de Horwood et Anglim (2019), selon laquelle la disponibilité d’appareils à portée de main a entraîné une augmentation de la distraction et une réduction de la capacité à réfléchir, à se souvenir et à réguler les émotions. Cela a contribué à réduire la durée d’attention chez les enfants et les adultes. Pour naviguer dans ce métavers « occupé », « bruyant » et « distrayant », les apprenants doivent apprendre et pratiquer la « régulation de l’attention ». La régulation de l’attention est la capacité à se concentrer sur l’activité ou la tâche en cours. Un équilibre entre l’exploration, les choix et les interactions significatives aide à cultiver les capacités d’attention nécessaires. Le métavers doit comporter des tâches qui permettent aux enfants d’explorer leur environnement et leur donnent l’occasion de découvrir de nouveaux objets et de nouvelles expériences. Par exemple, une activité consistant à trouver des objets cachés dans une image numérique peut contribuer à développer l’attention. La régulation de l’attention en tant que compétence d’apprentissage dans nos systèmes éducatifs, dès la petite enfance, contribuera à cultiver les capacités d’attention en inhibant les distracteurs.
Réguler les émotions
Les interactions et l’apprentissage déclenchent des sentiments et des émotions. Il est nécessaire de développer une conscience émotionnelle, de faire une pause et de remarquer les signaux émotionnels du corps. La pratique de la pause – l’allocation consciente d’espace et de temps pour se tourner vers l’intérieur et remarquer les sensations physiques comme un « pouls rapide », une « jambe qui tremble » ou une « main moite » – est indispensable au bien-être. Lorsque tout semble s’écrouler, il est utile de respirer. Il est prouvé qu’en comptant nos respirations et en les centrant, nous calmons notre esprit. Qu’il s’agisse de conversations difficiles avec des collègues, la famille, des amis, des enseignants ou des élèves, la capacité à réguler ses émotions et son attention est une pratique de bien-être dont il est prouvé qu’elle atténue l’anxiété, la peur, la colère ou le désespoir qui l’accompagnent.
Par exemple, il est important d’apprendre aux enfants à faire une pause ou un arrêt lorsqu’ils ressentent de la colère ou de la peur et à reconnaître les sentiments physiques. Un creux dans l’estomac ou un cœur qui bat la chamade sont des symptômes physiques qui accompagnent souvent les réactions émotionnelles intenses. Dans ces moments-là, un ami, une application, un exercice conscient comme compter les nombres, les respirations ou les carreaux sur le sol, un temps mort ou une pause, ou encore la marche peuvent être de bons moyens de détourner physiquement l’attention et de permettre à l’intensité de l’émotion de diminuer.
Développez l’empathie
L’empathie stimule l’émotion et est une force puissante qui relie les êtres humains. Elle peut être évoquée à l’aide d’histoires et d’échanges verbaux. Les histoires stimulent les réseaux cérébraux qui établissent des connexions émotionnelles. Le dialogue facilite et intensifie le partage des connaissances, des idées, des mots et des émotions – qu’il s’agisse de discuter de la diversité culturelle à travers des espaces physiques ou de l’apprentissage en classe. Les histoires peuvent être invoquées par le biais de multiples modes facilement accessibles dans le monde numérique, notamment l’oral, l’écrit, la vidéo, les bandes dessinées, la réalité virtuelle et même le jeu. Cette variété dans la transmission des histoires a la capacité de répondre aux besoins de tous les apprenants (Vaccaro et al., 2021).
Récemment, un cours interactif en ligne basé sur un jeu numérique a été conçu dans le métavers. Il a été développé autour d’un jeu à interface de chat textuel appelé Bury Me, My Love, et a été utilisé pour présenter aux étudiants la crise mondiale des réfugiés (Mukund et al., 2022). Le cours a exploité les points de pause du jeu et intégré des activités explicites telles que des discussions, des réflexions et des podcasts pour mettre en évidence les points qui nécessitaient la reconnaissance de leurs propres perspectives et de celles des migrants. Cela a permis aux apprenants de mieux connaître les migrants, de développer de l’empathie à leur égard et de les motiver à agir pour un changement positif. Nous espérons que cette expérience d’apprentissage se transposera dans le monde réel en termes de changement de comportement. Le cours a également permis aux enseignants de faciliter les discussions en classe, créant ainsi un modèle d’apprentissage mixte ou hybride.
Cultiver la compassion et la gratitude
Les actes de bonté activent les réseaux de joie et de récompense dans le cerveau et libèrent des endorphines et de l’ocytocine – des substances chimiques cérébrales qui offrent réconfort et sécurité et redonnent joie et espoir. L’apprentissage, que ce soit en face à face ou dans les métavers, doit mettre l’accent sur la culture de la compassion et de la gratitude. Faire preuve de compassion dans les métavers, c’est provoquer le changement de manière proactive. Il s’agit de prendre des mesures positives pour soulager la douleur et la souffrance et pour aider les autres – aussi petite que cette action puisse paraître – car ce sont les petites actions multipliées un milliard de fois qui changeront le monde.
Promouvoir la communauté
La plus grande leçon de la pandémie du COVID-19 a été l’importance de la « connectivité » du monde. Les métavers offrent de grandes opportunités pour sensibiliser les apprenants au monde connecté dans lequel nous vivons. Le monde en ligne est déjà perçu comme étant connecté parce qu’il s’agit d’une « toile », mais le monde physique est souvent perçu comme étant constitué de silos, physiquement séparés et distincts. L’apprentissage dans le métavers, qui utilise le dialogue numérique, les jeux multi-joueurs, etc., offre la possibilité de reconnaître la valeur d’un monde connecté qui doit être protégé et préservé par tous, pour tous et pour l’avenir. Il offre la possibilité de construire une citoyenneté mondiale car il offre un espace aux jeunes apprenants pour se connecter au-delà des distances géographiques.
Le métavers est là pour rester et nous ne pouvons pas laisser les apprenants y disparaître. Au contraire, nous devons adopter une réalité mixte entre les mondes physique et virtuel. Dans cette réalité mixte, le défi consistera à rester pleinement conscient des moments où nous nous trouvons dans le métavers et dans le monde physique, et à se souvenir de l’importance de traverser les deux mondes de manière résiliente sur le plan émotionnel. Pour vivre dans cette réalité mixte, il faudra développer notre capacité de régulation de l’attention, soutenue par un ensemble de compétences en matière de régulation émotionnelle, d’empathie et de compassion. En plaçant l’apprentissage social et émotionnel au centre des métavers, il est possible non seulement de combler le fossé entre la virtualité et la réalité (cette perte de conscience de la ligne invisible entre la virtualité et la réalité), mais aussi de favoriser la communauté et la parenté qui peuvent entraîner un changement de comportement dans le monde réel.